JULES VIARD - Saxophoniste français.

"Si l'on met sur le plateau tournant un disque de Viard, il sera bien difficile de savoir si ce qu'on entend est un air de violoncelle ou un air de saxophone.

L'instrument de Viard exprime une sensibilité surprenante, d'un charme invincible, d'une fluidité qui permet toutes les songeries, et en même temps d'une technique sobre, préservée de tout effet facile et de toute concession au mauvais goût.

Ce saxophone enchanté émeut comme une voix.

Que Viard joue du Reynaldo Hahn, du Couperin, du Granados ou du Fauré, on sent tout à coup ce que les airs qu'il a choisis comportent de souplesse nostalgique, de grâce fluide et de force d'évocation". Voici ce que l'on pouvait lire dans le catalogue Pathé de 1933 sur le saxophoniste.

Si aujourd'hui son nom ne vous évoque rien Jules Viard est pourtant à l'origine de nombreuses participations dans des orchestres des Années 30.

Jules Viard est né le 18 avril 1890. C'était un saxophoniste de génie capable d'aborder tous les styles de répertoire allant du Jazz (Duke Ellington) au Classique (Bach) !

Bien que décédé prématurément à 45 ans, le 31 octobre 1935, Viard avait eu le temps de graver quelques 40 faces de 80 tours et de 78 tours, de 1925 à la fin de sa vie. Il était le mari de la chanteuse Rose Temps.

De formation classique, il enregistra d'abord en soliste des airs classiques comme la Berceuse et le Clair de lune de Gabriel Fauré, le Chant d'amour d'Albéniz, l'Humoresque de Dvorak ou encore la Sérénade de Gabriel Pierné, puis à la demande des maisons de disques, il ensillonna les airs à la mode du cinéma parlant ou des opérettes d'actualités : Nina Rosa (Romberg), Rose-Marie (Friml) etc.

Viard était présent dans grands nombres de formations ; il jouait dans l'orchestre musette phare du célèbre Frédo Gardoni accompagnés de Manuel Puig et Pierre Baïz ; dans l'orchestre de Fred Mêlé ; avec André Cadou etc... On raconte que le chanteur de charme Fred Gouin exigeait que Viard soit dans l'orchestre lors des enregistrements chez Odéon. Il joua également dans le célèbre orchestre de "Billy Max Stiklen's Orchestra" (info : Malcolm McMillan).

Jules Viard enregistre pour plusieurs maisons de disques : Idéal, Pathé et Cristal principalement (on le retrouve également dans des sous-marques comme les disques de la Samaritaine ou Mag-Nis vendus par les "Magasins Réunis" et la Samaritaine). La firme Cristal spécialisée dans la musique de films lui demande de graver tous les succès du jour. Les étiquettes indiquent "Orchestre Musette Viard et ses As". A ce propos, il est étrange que les accordéonistes ne soient pas mentionnés sur les étiquettes ni dans le catalogue. Par contre celui du chanteur Monsieur Le Roy y figure (le même que chez Pathé). On peut imaginer aisément que Gardoni et Puig alors sous contrat d'exclusivité Pathé aient demandés de rester anonyme sur les étiquettes par peur d'un procès.

En plus d'être interprète, Viard laissera des transcriptions pour saxophone : Pièce en forme de habanera de Maurice Ravel (1926) ; La fille aux cheveux de lin et La plus que lente de Claude Debussy (1931) ; Poème d'amour de Liszt ; Chant Birman d'André Messager etc.

Il compose également et heureusement pour nous, il a enregistré quelques unes de ses compositions : Frolic-Sax, Soir d'amour et son merveilleux fox-trot qui deviendra son plus grand succès au disque : Slap and Laugh !

Jules Viard est aussi l'auteur d'une méthode d'apprentissage du saxophone, qu'il dédie au compositeur Henri Rabaud, toujours éditée chez Salabert.

Samuel MARC.

Sources :

Catalogues des disques Cristal (1934), Pathé (1933) ;

Méthode d'apprentissage du saxophone par Jules Viard, édition Salabert ;

Les cahiers Fred Gouin édités par Lionel Baudry, 1995.